mardi 22 août 2023

Et maintenant dansons !


En 1959, Henry Mancini sort dans les bacs la bande originale de la série tv "Mr Lucky" et son succès va être pratiquement similaire au désormais fameux "tum tum tum tum tum tum tum tum" (il y en a 8) de "Peter Gunn" en 1958, un Emmy et deux Grammy, et qui n'imaginait pas se retrouver plus tard sur des albums d'Art of Noise, des B 52's ou sur la BO des "Blues Brothers". 

Et jusqu'en, disons, 1966, "Mr Lucky" va être pratiquement partout, c'est à dire sur tous les albums instrumentaux des plus grands orchestres et en bonne place sur les opus des jazzmen les plus en vue. Car c'est aussi cela, la touche Mancini : incorporer des éléments de jazz dans des compositions plutôt pop. On n'a pas débuté une carrière dans le big band de Glenn Miller sans qu'il en reste quelque chose. 



L'exemple le plus significatif est peut-être George Shearing, roi incontesté du piano entre 1948 et 2011 (si si), inventeur du Shearing Sound (dont nous ne sommes pas vraiment en mesure de vous détailler les tenants et aboutissants, sauf qu'il est question de mélodie doublée à l'octave, si cela fait sens à quelqu'un...) et qui va, bien entendu, enregistrer "Mr Lucky" en 1965, avec cordes et chœurs. Comme il se doit donc. 

Blanc, anglais et aveugle de naissance, George Shearing va parfois être considéré comme l'équivalent pour le jazz de ce que fut Liberace, ou Richard Clayderman pour la musique classique. Inscrivons-nous en faux. George fut bien plus que cela. Et les autres peuvent-ils se targuer d'aussi suaves collaborations ? 


























En tout cas, pendant plus de 6 ans, "Mr Lucky" va d'abord s'envisager comme le thème chic par excellence, avec cette intro d'une suavitude extrême qui semble réclamer un Martiny dry et une cigarette king size. 

C'est la sophistication poussée dans ses derniers retranchements, et surtout cela va avec tout : orgue, trompette, piano évidemment et cordes de toutes longueurs. C'est en fait l'équivalent de la haute couture : cela semble tout bête mais on sait que cela demande des heures de travail par des petites mains expérimentées. C'est Mancini en fait, le Dior de la pop, le YSL de la variété.

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