Oui mais voilà, c'est fini. De toutes les façons cela ne pouvait pas durer et il y a toujours un nouvel album à préparer, une fille dont il faut s'occuper et une vie privée à protéger, ce qui prend beaucoup de temps.
La semaine est finie mais l'été aussi, voilà pourquoi Sade ne sera remplacée par personne dès lundi. Comme chaque année alors que septembre pointe à l'horizon, nous nous éclipsons pour un repos bien mérité.
En vous souhaitant la plus suave des rentrées ou des reprises, nous vous embrassons et nous vous donnons rendez-vous au plus tard au 17 septembre. D'ici là soyez sages. Et soyez suaves, bien évidemment.
Depuis le premier jour de l'été et le début de notre panorama estival des groupes vocaux, nous savions que si nous devions terminer par une formation en particulier, cela serait par Les Soeurs Etienne. Alors d'accord, ce n'est peut-être pas le groupe le plus avant-gardiste ni celui qui révolutionna le monde de l'accord et du contre-chant mais nous n'y pouvons rien, notre amour pour les Soeurs Etienne étant totalement irrationnel.
A la différence d'autres artistes évoqués précédemment, nous sommes incapables de savoir d'où cela vient ni quand cela a commencé, nous ne sommes même pas certains d'être en mesure d'expliquer ce qui nous séduit tant chez Louise et Odette, dont les simples prénoms évoquent plus le pot-au-feu et le hareng pomme à l'huile que le swing ou le jazz.
Grave erreur pourtant, version française des Andrews ou des Boswell sisters, les Soeurs Etienne vont incarner entre 1945 en 1955 un certain renouveau de la chansons française, relativement déprimante et réaliste jusque là et surtout faire bouger le public des cabarets et des salles de spectacle avec leurs voix de rossignols, leur sens du rythme et leurs harmonies ultra serrées.
Il est surprenant qu'on n'ait pas encore réalisé un biopic sur le destin des deux soeurs qui est exemplaire : Odette et Louise aiment chanter dans leur Reims natal, elles participent séparément à un concours de chant local qu'elles remportent à quelques jours d'intervalle. Les voici en finale l'une contre l'autre ce que leur père juge insupportable. Il les encourage donc à se présenter en duo afin d'éliminer les autres concurrentes. Les Soeurs Etienne viennent de naître.
Arrivée à Paris où elles chantent dans des cabarets (Odette a 14 ans, Louise à peine 19), elles aiment les succès américains mais qui sont difficiles à chanter en 1943. Ce sera nettement plus facile après la libération et comme elles sont les seules à faire cela, les voilà embauchées par l'orchestre de Glenn Miller avec lequel elles resteront pendant des semaines.
La suite est un rêve : tous les orchestres les veulent, Raymond Legrand et Loulou Gasté se les disputent, Decca veut les signer. Leurs premiers disques déclenchent la folie Etienne et le répertoire va être impeccable, entre chansons originales et reprise de succès US. Et c'est surtout un triomphe presque à chaque fois. C'est vif, joyeux, léger... autant d'adjectifs que nous accepterions volontiers si on les utilisait pour nous définir.
A partir de 1955, les deux soeurs vont préférer se consacrer à leur vie de famille mais c'est sans imaginer que 30 ans plus tard, la télévision va de nouveau faire appel à elles. C'est d'abord Jacques Martin qui les fait revenir puis Pascal Sevran et vaillamment, elles retournent en studio.
Odette est décédée en 2013 et Louise en 2016 mais avant cela, la plus âgée des soeurs avait accordé un entretien d'une heure à France Culture disponible ici. Ou comment raconter avec humour et détachement qu'on a découvert le Québec en voiture avec Aznavour, fait des âneries avec Salvador et on s'est battu pour être les premières à enregistrer "C'est si bon" dont personne ne voulait ou presque.
Ce n'est pas vieillot. Ce n'est même pas vintage. C'est juste de la musique et malgré les années, c'est toujours aussi suave.
Parce qu'à trois, c'est aussi bien qu'à deux, sinon mieux, "Soyons-Suave en vacances" est heureux de vous offrir trois extraits d'un abécédaire indispensable.
Il n'est pas impossible, au vu des courriers parfois reçus, que bon nombre de nos suaves visiteurs nous imagine évoluant dans des locaux occupés aux 3/4 par des dizaines de milliers de disques et, pour le quart restant, d'archives sur des personnalités décédées de préférence féminines.
Si cela n'est pas totalement éloigné de la réalité (enlevez tout de même quelques milliers de disques) et qu'il est vrai que la musique est depuis toujours une part importante de notre quotidien, nous sommes toujours stupéfaits par l'immensité des galaxies encore à découvrir et rien n'est plus excitant pour nous que de tomber par accident sur quelque chose dont nous n'avions jamais entendu parler. Et dont nous devons alors absolument tout connaître.
Suaves visiteurs, cet été 2018 aura été très riche en découvertes, musicales notamment et dont nous reparlerons très prochainement mais l'une des plus belles est incontestablement le Quartetto Cetra, qui de la fin des années 40 à celle des années 80, va faire la joie des oreilles italiennes et des shows de la Rai.
Formé à Rome au début des années 40 et exclusivement masculin, le Quartetto Cetra va véritablement prendre son envol lorsqu'en 1947, ils vont accueillir Lucia Mannucci, devenant ainsi une formation mixte qui ne va plus bouger jusqu'à leur dernier concert en 1988. Et si leurs premiers succès vont venir des enregistrements en italien que leur confie Walt Disney qui les adore, le Quartetto Cetra va littéralement exploser à la télévision où ils vont être adoptés et incontournables dès 1954.
En fait, la liste impressionnante de leurs enregistrements n'a d'égale que celle des shows auxquels ils vont participer au cours de leur quarante ans de carrière, faisant d'eux, au passage, le groupe italien avec la plus formidable longévité. Les Cetra sont drôles, ils sont capables de tout chanter, de s'associer avec n'importe qui, ils n'ont rien contre un sketch ou une parodie. Et c'est sans doute cette flexibilité qui va leur permettre d'affronter les modes et les époques.
Chantant principalement en italien ce que ne prouve pas la vidéo ci-dessus mais qui permet d'apprécier le luxe des productions de la Rai des années 60, la réputation des Quartetto Cetra ne va pas particulièrement franchir les frontières, ce qui n'est finalement pas tant un problème lorsqu'on jouit d'une telle popularité dans son pays natal.
Et puis cela donne l'occasion à ceux, comme nous, qui viennent simplement de faire leur connaissance, de plonger avec délices dans les dizaines de documents les concernant disponibles sur Youtube et la centaine d'enregistrements heureusement très accessibles parmi lesquels il est très difficile de choisir.
Mais puisque nous avons passé une bonne partie de l'été à nous rappeler combien est délicieux un baiser à minuit, ne nous posons pas la question. Et embrassons-nous.
Il n'est peut-être pas utile de nous lancer dans une explication très pointue de ce qu'ont été les Double Six, alias les Double Six de Paris, qui, entre 1960 et 1966, vont enregistrer 4 albums qui vont, ni plus ni moins, révolutionner le jazz vocal et redéfinir le son des groupes vocaux, en France et dans le reste du monde.
Alors bien sûr, il n'y aurait sans doute pas eu de Double Six sans Lambert Hendricks and Ross, les premiers à caler paroles et onomatopées sur des instrumentaux mais ils faisaient cela en anglais. Les Double Six vont prouver l'inconcevable : le français peut swinguer, si on prend le temps de bien choisir les mots adéquats et qu'on a quelque connaissances en phonétique.
Nous avons toujours eu l'impression qu'écouter les Double Six vous rendait plus intelligent, c'est d'ailleurs ce que certains vont leur reprocher, un chant et un jazz très cérébral alors que l'analyse des paroles, spécificités du groupe, sont généralement assez bêtes, tout en étant parfaitement choisies.
Et tout cela, c'est à Mimi Perrin qu'on le doit, créatrice du groupe, licenciée d'anglais, magnifique pianiste et chanteuse, qui fera pas mal de yéyéyé derrière Richard Anthony ou d'idioties derrière Henri Salvador jusqu'à ce que celui-ci lui fasse rencontrer Quincy Jones qui mènera au premier album des Double Six.
Quand on a été dans Les Blue Stars de Paris et qu'on a créé les Double Six, il est difficile de faire mieux. En 1966 lorsqu'elle arrête sa carrière et le groupe pour des raisons de santé et que la plupart des Double Sux partiront pour donner naissance aux Swingle Singers, Mimi reprendra sa première passion, l'anglais, et deviendra une des traductrices les plus recherchées, la préférée par exemple de John Le Carré.
Alors qu'en 1988, Gabriel Yared écrit la musique du film de Jean-Pierre Mocky "Les Saisons du plaisir", il a cette idée totalement folle de reformer les Double Six. Mimi Perrin ne chante plus mais elle accepte d'écrire les paroles de la chanson titre. Christiane Legrand, Claudine Meunier et Jean-Claude Briodin, membres originaux, reprennent du service et c'est magnifique.
C'est même l'un des rares intérêt du film si vous voulez notre avis.
Parce qu'à trois, c'est aussi bien qu'à deux, sinon mieux, "Soyons-Suave en vacances" est heureux de vous offrir trois idées croisières pour l'arrière saison.
Il aura donc fallu arriver à la dernière semaine de notre saison estivale pour le Quizz coince et on peut dire que lorsque ça coince, ça coince : pas une proposition, à peine un indice. Etes-vous donc si perdus ?
Voici donc trois nouvelles captures de ce film mystérieux qui désespère de retrouver son titre, son casting impressionnant et sa sulfureuse réputation.
Nous vous entendons d'ici vous écrier : "Ah mais bien sûr !". Alors pas d'hésitation : un seul nom par proposition, tout le monde joue. A vos cellules grises.