L'été, ou tout au moins, le retour des beaux jours entre deux averses, étant propice à l'évasion et parfois à l'abandon, nous nous sommes retrouvés, presque par accident, à parcourir le sensationnel magazine Elle Décoration, ce qui ne nous était pas arrivés depuis fort longtemps.
Autant vous le dire, suaves visiteurs, cette lecture, agrémentées de quelques long-drinks, s'est révélée surprenante et très inspirante. Nous y attendions-nous ? Pas du tout.
Lancé en 1987 et possédant aujourd'hui plus de 25 éditions à travers le monde, le premier choc à la lecture du numéro "Spécial été" de Elle Deco a en fait été une question, à savoir : comment, après 27 années d'existence, à raison de 11 numéros par an, est-il encore possible de trouver de par le monde, des jeunes couples qui abandonnent tout pour ouvrir un hôtel de charme dans les Pouilles, une céramiste qui tombe par hasard sur une ancienne usine de pneus et en fait un loft familial de 1200 m2 et des architectes qui, par coup de coeur, élèvent des villas minimalistes au Cap face à l'océan Atlantique sud déchaîné ?
Il doit, quelque part, exister un fichier, ou une école, ou même une crèche, qui prépare très tôt de jeunes innocents aux pires folies architecturales.
Mais passée cette surprise, le grand choc est en fait venu du style et là, étrangement, nous ne parlons pas de décoration. Car à ce propos, Elle Déco suit une ligne tracée depuis ses débuts : matières naturelles, lignes pures, artisanat local (beaucoup de coussins, de paniers, de lampes en métal martelé... oh et des tapis parce que c'est important les tapis) qui fait qu'on peut feuilleter le magazine sans grand risque de choc esthétique. Oui il y aura, non des piscines mais des bassins, de grandes terrasses avec banquettes profondes, souvent en béton, et des harmonies douces et caressantes. Plus quelques trouvailles chinées par accident et un tableau réalisé par la propriétaire elle-même.
Le style Elle Déco dont nous tenons à souligner le brio se trouve en fait dans les textes, parfois même dans les simples accroches (nous ne l'avons pas examiné mais nous supposons que même l'ours en est révélateur) qui offrent, eux, un véritable feu d'artifice, un banquet, n'hésitons pas à le dire, de ce que la langue française propose de meilleur. Vous avez déjà été séduit par "la ribambelle de coussins bohème-chic" ci-dessus, vous vous régalerez de ce qui suit :
"La triade égéenne", "la minéralité" qui peut se révéler "chaleureuse", "vertige des vestiges"... Les maisons sont "posées", les "tapis animent les sols", les suspensions "coiffent les tables", les rideaux "bercent les siestes". Magie des images poétiques, féeries des assonances et des allitérations, festival d'aphorismes et régalades de présents gnomiques, Elle Déco est vraiment l'ambassadeur du bon goût français.
Voilà pourquoi, si d'aventure vous souhaitez passer des vacances intelligentes et peut-être vous laver les yeux de 10 mois de courriels encombrés de mauvais accords de participes passés et de sms sans relief, choisissez Elle Déco, c'est finalement comme lire un volume, et peu importe lequel, de La Pléiade avec en plus, l'assurance de conseils que vous ne trouverez jamais chez Rutebeuf ou Alfred de Vigny.
Même si parfois peut naître cette désagréable impression qu'on nous prend un peu pour des abrutis...
3 commentaires:
Un peu ? Vous êtes drôlement gentils sur ce coup-là.
En même temps, il y a visiblement tout un lectorat qui adore qu'on le mène par le bout du nez.
Pruneauxyz.
Merci, So-Su : votre chronique m'a rappelé que je dois acquérir un volume des Regrets de Du Bellay.
:)
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