Au début de l'année 1952, James Dean revit. Sur les conseils de son mentor et amant, le producteur de radio Roger Brackett, il a quitté Los Angeles et l'université de UCLA pour venir s'installer à New York. Et pas une seconde il ne regrette d'avoir quitté la Californie. Arrivé dans la cité des Anges plein d'espoir, il a rapidement du se rendre à l'évidence : personne ne l'attendait, lui, pourtant ancienne vedette du lycée de Fairmont dans l'Indiana et ce ne sont pas ces trois rôles muets et non crédités aux génériques qui allaient faire de lui la nouvelle coqueluche d'Hollywood. Le cinéma n'était peut-être pas pour lui. Pas plus que le soleil et l'océan pacifique.
New-York est indubitablement une métropole plus consistante et on y trouve surtout l'Actor Studio où Lee Strasberg enseigne La Méthode à des élèves pas encore illustres parmi lesquels Marlon Brando ou Julie Harris. Après quelques apparitions dans des dramatiques télé, James Dean y entre à son tour, assez fier d'y être l'un des plus jeune élèves, il a à peine 21 ans et il va totalement s'immerger dans Stanislavski. On imagine aisément les conversations d'après cours où il devait être question d'investissement émotionnel et de recherche de vérité mais James Dean a un problème : il n'est pas à l'aise dans son corps.
Au cours de ses soirées, le jeune comédien a sympathisé avec Eartha Kitt, qui après avoir tourné quelques années en Europe et notamment en France, s'est installée à New-York où elle tente de lancer sa carrière sur les planches. A l'affiche de différents cabarets, elle attend pour le moment de savoir si elle fera partie de la nouvelle revue que montent Leonard Sillmann et Mel Brooks. Eartha Kitt est avant tout danseuse et c'est à ce titre qu'elle va proposer à James Dean de l'aider à résoudre ses petits problèmes de motricité.
Pendant quelques mois, James Dean va donc rejoindre chaque semaine celle qui le considère comme son petit frère aux cours de danse qu'elle donne à Manhattan et découvrir les joies des entrechats et de l'arabesque, du jeté-battu et du pas de bourré. Et bouger devient alors presque agréable. James Dean découvre surtout que son corps peut exprimer une certaine sensualité, qu'il admire particulièrement chez Eartha. Elle devient en fait son modèle et il calque sa marche sur ses ondulations.
Rapidement les habitudes s'installent : après avoir sainement transpiré, Eartha et James se retrouvent devant un café et discutent pendant des heures. Ils évoquent leur enfance, leurs rêves, leurs doutes. Elle lui explique qu'elle n'a jamais connu son père, il lui avoue qu'il aime qu'on écrase sur ton torse des mégots de cigarettes. Une amitié est née mais qui sera de courte durée puisque trois ans plus tard, James Dean, au volant de sa Porsche, percute un autre véhicule et meurt sur le coup.
Si finalement l'acteur appliqua à la lettre sa devise "Il faut vivre vite, mourir jeune et faire un beau cadavre", Eartha Kitt vivra, elle, de nombreuses vies qui ne prirent fin qu'en 2008, prouvant, ce qui est tout aussi suave, qu'on peut aussi vivre vieux et faire une très spectaculaire octogénaire.
1 commentaire:
J'ignorais tout de cette amitié... Merci !...
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