mercredi 8 mai 2019

La question suave du jour : Billy Porter est-il enfin lui-même ?


































Voilà des mois et des mois que nous souhaitons consacrer un billet à Billy Porter, une belle histoire du samedi en fait, mais les parutions du weekend étant incertaines, le temps bien trop fuyant et l'actualité nous rattrapant, il semblerait qu'aujourd'hui soit le jour. 

Car Billy Porter a des chances d'être absolument partout en cette journée post Met Gala, charmante soirée caritative organisée par Anna Wintour où les riches, beaux et célèbres se déguisent et permettent au monde d'être noyé sous des centaines de clichés de Kathy Perry en chandelier et Céline Dion en Judy Garland période Ziegfeld Girls. 

Aussi réussies qu'elles aient été, les tenues de Gwen Stefani, Lady Gaga ou Jared Leto vont irrémédiablement être éclipsées par l'ensemble Cléopâtre "Entrée dans Rome" que Billy Porter semblait être destiné à porter un jour. Illustrations :




































Chanteur, comédien, auteur, Billy Porter n'est inconnu de presque personne depuis son apparition dans la série "Pose" dont la deuxième saison est attendue pour juin.

Et il l'est encore moins des amateurs de Broadway où il fut pendant 4 ans la Lola de "Kinky Boots", comédie musicale signée Harvey Fierstein et Cindy Lauper, un rôle de travesti qui lui permit de remporter le Tony Award du meilleur comédien. 



































Animateur acerbe de ball dans le New York des années 80, drag queen, rien d'étonnant donc à ce que Porter ait été particulièrement interpellé par le thème du Met Gala de cette année, "Le Camp", ni qu'il y paraisse en créature sortie de "Stargate". Quoi que... à bien y réfléchir... et c'est ce qui nous plait tant dans son histoire par bien des aspects suave et exemplaire.

En 1997, il y a donc plus de 20 ans, Billy Porter, qui s'était fait remarquer par sa voix tout simplement extraordinaire dans une dizaine de spectacles à Broadway, était en passe de devenir un chanteur de R'n'B pour adolescentes, une sorte de R Kelly ou de Boyz II Men à lui tout seul. C'était en tout cas ce que sa maison de disques espérait en croisant les doigts. 




Chemise ouverte, balade en voiture, rythmique idéale pour faire des bébés, Billy Porter avec un premier album très smooth pouvait prétendre à une célébrité certaine, d'autant qu'un de ses titres venait d'être placé sur la bande originale du "First Wives club" avec Bette Midler, Goldie Hawn et Diane Keaton et que le film était en tête du box-office.

Le problème, c'est que l'intéressé n'avait aucune envie d'exciter les adolescentes et qu'une balade en voiture chemise ouverte était éventuellement acceptable si la passagère était remplacée par un charmant jeune homme.

Très flamboyant, ne faisant aucun mystère de sa vie privée, Billy Porter claqua la porte de sa maison de disques après le meeting de trop où on lui demanda une fois de plus de se taire pour ne pas que sa suave nature n'effraye les annonceurs, ce qui, honnêtement, n'était un secret pour personne, en tout cas pour aucun des spectateurs qui avaient assisté à sa main mise plus camp que camp du rôle de l'ange dans "Grease" lors de sa reprise sur les planches en 1994.



Nous pensons sincèrement que ce numéro devrait figurer dans toutes les anthologies de la suavitude et occasionnellement être montré dans toutes les écoles de chant. Et n'ayez pas honte de l'avoir regardé trois fois de suite avant de poursuivre la lecture de ce billet. Tout en l'écrivant, nous avons fait de même. 

Sans contrat pour le moindre enregistrement, toujours sur les planches mais avec une lassitude croissante, Billy Porter quitta tout pour suivre une formation de scénariste à Los Angeles au début des années 2000 et cela marcha si fort qu'en 2010, il se déclarait en faillite, vivant chez des amis assez aimables pour lui prêter leur canapé. 




































Trop gay, trop noir, trop bavard, c'est exactement pour toutes ces raisons qu'en 2013, il décrochait le rôle principal de "Kinky Boots" qui allait, non pas être une renaissance mais une naissance tout court puisque rien n'avait véritablement démarré pour lui, qui approchait alors les 45 ans. 

Depuis, Billy Porter goûte au plaisir incommensurable d'avoir le choix, d'être demandé partout et de pouvoir, enfin, se permettre de faire ce qu'il veut puisqu'il s'appelle Billy Porter et que le monde l'aime. 

Et cela se manifeste principalement sur les tapis rouges où son message, via ses choix vestimentaires, tient à la fois du "Oui je suis fabuleux" et du "Je vous emmerde". 





































Voilà pourquoi on peut raisonnablement penser que oui, Billy Porter est enfin lui-même.

Et si on pourra sans doute lire un peu partout aujourd'hui qu'il était vraiment courageux de se présenter ainsi au Met Gala, souvenons-nous que l'année dernière, il se rendit à la cérémonie des Oscars, en robe, au bras de son mari, blanc et plus jeune que lui.

Billy Porter est notre ami.  


1 commentaire:

Jérôme (moins anonyme) a dit…

Votre ami, oui. Mais vous a-t-il passé les patrons de ses tenues?