jeudi 29 avril 2010

Les très suaves heures de l'histoire contemporaine : le jour où Hedy Lamarr vendit tout !



En 1951, Hedy Lamarr, qui fut un temps "La plus belle femme du monde", commence à se dire que ses plus belles années sont peut-être derrière elle. Car même si elle sort d'un triomphe, "Samson et Dalila" de Cecil B. Demille, les propositions des studios ne sont guère folichonnes. Et un détail ne trompe pas : on commence à la contacter pour des comédies, ce qui est, pour une reine de beauté, l'équivalent d'un grand rôle dramatique pour une impératrice du rire : un sauvetage perdu d'avance, moins la perspective de recevoir un prix d'interprétation.

Hedy sait que sa notoriété a essentiellement été construite sur son apparence, elle vieillit, de plus jeunes actrices envahissent les écrans et sous peu, on ne tardera pas à lui proposer des rôles de mère. Ce sera pour 1958 dans "The female animal" où on lui donnera Jane Powell, âgée de 29 ans comme fille. Scandalisée, Hedy refusera toute scène avec elle, rendant le scénario un peu étrange.


Hedy Lamarr et sa perpétuelle migraine.

En tout cas, si sa beauté ne passe plus à l'écran, dans la vie, Hedy est toujours aussi populaire et elle n'est pas peu fière de son nouvel époux, le quatrième, Ted Stauffer, suisse d'origine et surnommé "le roi du swing helvétique" dans les années 30, reconverti dans la restauration à Acapulco. Ted est riche, ses restaurants et boites de nuits font de lui le roi des nuits mexicaines, il lui propose une vie douce et mondaine au bord du Pacifique. Hedy pense donc : pourquoi pas, bien qu'il faille quitter Los Angeles. A moins de le faire sur un coup d'éclat.


Lorsqu'elle contacte Arthur Goode, directeur de la American Art Gallery de Los Angeles, ce dernier pense que l'actrice veut faire de la place chez elle et se débarrasser de quelques souvenirs. Il sera un peu surpris en découvrant que mis à part ses soutiens-gorge, Hedy Lamarr vend tout, même ses culottes. Demandons-nous en passant pourquoi alors garder les soutiens-gorge... Conscient qu'il tient la vente de l'année, Goode va orchestrer l'opération comme une première de film : publicité dans la presse, affiches immenses dans Hollywood et le jour de l'ouverture, le 25 juin 1951, ce sont des milliers de curieux qui se pressent devant la vitrine de la salle, au point que Life Magazine dépêche aussitôt un photographe et que la nouvelle fait le tour des Etats-Unis.


Le catalogue de l'exposition est un mélange hétéroclite qui va de la poupée à l'effigie de la star à un piano signé de la main même d'Hedy, en passant par son lit, ses fourrures et ses quatre réfrigérateurs. C'est la première fois que l'intimité d'une star est ainsi exposée et qu'on peut, en y mettant le prix, s'acheter un petit bout de son quotidien, une simple tasse à café si on le désire. Si l'essentiel des visiteurs ne viendra que par curiosité, les marchands d'art se déplaceront également, intéressés par les Utrillo et les Duffy de l'actrice ainsi que par ses bijoux, dont les pièces maîtresses sont un bracelet serti de 483 diamants et une parure d'émeraudes d'une valeur de 16000$.


Pendant un mois, la face privée d'Hedy Lamarr va passionner les foules et la vente finale sera un succès, atteignant le chiffre record de plus d'un million de dollars, ce qui fait beaucoup de Tequila Sunrise à déguster face aux embruns. Il n'en sera pas de même pour son mariage qui se soldera par un divorce l'année suivante, provoquant le retour de la star aux USA et son retour devant les caméras.

En 1968, Hedy Lamarr renouvellera l'expérience, quittant une nouvelle fois Los Angeles mais pour cette fois se rapprocher de ses enfants à New-York. Elle vendra une nouvelle fois la totalité de ses biens et cette fois-ci, ce sont ses éditions originales et signées de Rudyard Kipling qui feront l'événement. Mais on sera loin du million de dollars précédent. Décédée en 2000, totalement oubliée et totalement cleptomane, Hedy Lamarr fera une dernière fois parler d'elle dans le monde fascinant de la brocante et des antiquités lorsque le musée de cire MovieLand organisera en 2006 la vente exceptionnelle de certaines de ses statues, en fait pour faire de la place. Celle d'Hedy, dans "la femme des tropiques" se vendra pour 12000 dollars. Et si vous vous interrogez sur l'intérêt d'un tel achat, sachez qu'il est toujours suave de posséder une bougie taille réelle en chemise blanche et caraco cachemire.

3 commentaires:

bbjane a dit…

Excellent article et remarquables photos -- la commère chapeautée, près du lit, et qui se reflète dans le miroir, est une merveille... Merci pour cette page d'une "petite histoire" que j'ignorais...

soyons-suave a dit…

Merci BBJane, et avouons que c'est également notre préférée.

Claire a dit…

J'ignorais moi aussi cette "petite histoire". Excellent.