dimanche 7 avril 2013

Les très suaves heures de l'histoire contemporaine : le jour où on déménagea le fantôme de Marilyn.

















A l'été 2001, le changement d'adresse d'un restaurant de Hollywood aurait pu passer relativement inaperçu si Max, le propriétaire du dit-restaurant, le "All Star Theatre Cafe", n'avait fortement médiatisé (dans la presse locale, calmons-nous tout de même) le fait qu'il ne déménageait pas que les meubles mais emportait également dans ses cartons le fantôme de Marilyn Monroe. 

Peut-être l'ignorez-vous mais les fantômes sont légion à Hollywood et on compte pratiquement autant de "Ghost Tours" que de "Stars Tours" pour touristes. Déménager un revenant et qui plus est celui de Marilyn ne s'était cependant jamais vu. Drôle d'affaire. Drôle d'histoire pour un dimanche. 





















L'affaire commence un an avant la naissance de Marilyn, en 1925, lorsque le Knickerbocker Hotel ouvre ses portes dans ce qu'on considère aujourd'hui comme le coeur historique d'Hollywood. Situé sur Ivar Avenue, à quelques mètres de Hollywood boulevard, l'établissement va rapidement devenir le lieu de rendez-vous de la jet-set des studios : appartements luxueux, décoration renaissance et surtout un bar que ne quitte pas Valentino et dont la légende prétend qu'il y entrait à cheval. 

Pendant pratiquement 40 ans, l'adresse sera aussi incontournable que le Chateau Marmont, le Roosevelt ou le Garden of Allah, fréquenté par des gens aussi divers que Lana Turner ou Elvis Presley qui s'y prêtera à une séance photo pour le moins surprenante en 1956, alors qu'il s'apprêtait à tourner son premier film pour la MGM et avait loué l'intégralité du 11e étage de l'hôtel. 























Mais nous nous égarons. 

La réputation plus sulfureuse du Knickerbocker débuta certainement en 1943 lorsque la police y arrêta Frances Farmer après de nombreuses plaintes de la direction et un refus de se soumettre à un test d'alcoolémie. C'est en fait dans sa chambre d'hôtel que l'actrice perdit tout sens des réalités. Arrêtée, elle passera les 7 années qui suivirent en hôpital psychiatrique et en ressortira une lobotomie plus tard. Mais vous avez sans doute vu "Frances" avec Jessica Lange. 

En elle-même, l'arrestation d'une actrice ne peut entacher la réputation d'un hôtel, à moins qu'on y voit la confirmation que de mauvaises ondes circulent au 1714 Ivar Avenue, ce que confirmera la mort brutale et quelque peu tragique en 1948 de D.W. Griffith, sous le lustre en cristal de la réception, d'une hémorragie cérébrale. Une même hémorragie emportera l'acteur William Frawley alors qu'il passait devant les portes de l'hôtel (il décédera lui aussi à la réception) et en 1962, la costumière Irene, qui avait pris la succession d'Adrian à la MGM, y mettra fin à ses jours, en s'y ouvrant les veines et en sautant du 11e étage. 




















En 1970 et sans relation avec les décès mentionnés, on décida que le Knickerbocker n'était plus rentable et on le transforma en résidence pour personnages âgées, ce qui lui permit d'éviter d'être changé en parking comme bon nombre de ses collègues. 

Mais on prit surtout une décision étrange : on mura en effet l'ancien bar, seule partie qui ne fut donc pas réhabilitée et espace étrangement laissé vacant dans une ville où le mètre carré vaut très cher, en avouant à demi-mot que l'endroit était hanté. Les lumière s'y éteignaient seules, on y sentait des présences et certains certifiaient y avoir croisé Valentino. 

















Pendant plus de 20 ans, le bar du Knickerbocker restera fermé jusqu'à ce qu'en 1993, Max (en fait David Fisher) n'y ouvre le "All Star Theatre Café", version très modernisée du bar originel, un établissement de nuit où on va revoir errer le monde du cinéma qui va en faire sa cantine pour fête de fin de tournage ou raout post-premières. 

Peu de temps après son ouverture, les mêmes rumeurs vont se répandre : le lieu est hanté et on y a même vu Marilyn Monroe dans le miroir des toilettes femmes, Marilyn qui avait passé au Knickerbocker sa nuit de noces après son mariage avec Joe Dimaggio en Janvier 54. 





















Remarqué comme un des établissements recommandés de Los Angeles, le "All Star Theatre Café" va voir sa popularité stoppée net lorsqu'en 2001, les propriétaires du Knickerbocker réalisent qu'ils ne rentabilisent pas comme ils le pourraient cet emplacement redevenu formidable. Changeant le bail annuel en bail mensuel, ils demandent un tel loyer que Max rend son tablier. Le "All Star" doit déménager. Et c'est là que l'histoire s'envole.

Il ne faudra pas longtemps pour que le "All Star" ne choisisse sa nouvelle destination : le Vogue Theater situé sur Hollywood Boulevard, un cinéma construit sur l'ancien emplacement d'une école primaire dont l'incendie en 1901 fit 25 victimes dont 24 enfants. 



















Le Vogue projeta des films (pornographiques sur la fin) jusqu'en 1992, resta un temps à l'abandon jusqu'à ce qu'il soit acheté en 1997 par la SIRP, alias la Société Internationale pour la Recherche en Paranormal. Au départ simplement en quête de bureaux, la SIRP découvrit rapidement, c'est du moins ce qu'elle raconte, que le Vogue abritait au moins 6 entités ectoplasmiques. 

A partir de là, le cinéma se transforma en sorte de lieu occulte, alternant conférences sur le paranormal et visites à la rencontre de fantômes mais ce qui est loin d'être aussi inquiétant que cette image tirée du film "Alex in Wonderland" de Paul Mazursky sur laquelle on voit très nettement Jeanne Moreau apparaître devant le Vogue dans le coin gauche de la photo. 
























C'est finalement la SIRP qui invita le "All Star Theatre Café" à emménager dans ses murs, certaine que les fantômes du Knickerbocker dont l'illustre Marilyn sauraient attirer ceux que les propres fantômes du Vogue laissaient quelque peu indifférents. On déménagea donc prudemment le fameux miroir dans lequel on avait vu Marilyn. On ouvrit en grande pompe... pour fermer deux ans plus tard. 

La durée de vie moyenne d'un établissement à Los Angeles étant de 9 ans, le "All Star Theatre Cafe" s'en sortit plutôt bien : 8 ans au Knickerbocker, 2 ans au Vogue. Après quelques années d'abandon, le Vogue fut acheté par un promoteur de night-club qui y installa le SupperClub, toujours en activité mais qui arrive dans les limites dangereuses des 9 années d'existence. Il n'y est plus question de Marilyn, dont le fantôme aurait été "libéré" par la SIRP avant de la vente des locaux. Le seul véritable disparu de l'histoire est Max, et peut-être le charme de l'ancien Hollywood. 















Car nous ne sommes pas certains que Valentino ait eu la possibilité d'entrer au SupperClub à cheval. Ni l'envie d'ailleurs. 

1 commentaire:

charlus80 a dit…

Formidable. On s'y croirait. Vous racontez si bien.. A croire que vous y étiez aussi! Encore, encore