La mort de Marjorie Main en 1975 à l'âge de 85 ans surprit ceux qui la pensaient disparue depuis fort longtemps, tout autant que ceux qui la savaient vivante mais imaginaient qu'elle était beaucoup plus proche des 150 ans.
Voilà bien le problème des actrices qui ne font pas leur âge : pendant pratiquement 30 ans, Marjorie Main incarna des femmes qu'on supposait quinquagénaires. Elle est à ce titre à classer dans la même et très suave catégorie où règnent en stars absolues Agnes Moorehead ou Thelma Ritter, et ne parlons pas de Marie Dressler dont elle reprit plus ou moins les rôles dans les années 40.
S'il est un point commun entre le cinéma français des années 40/50 et son cousin américain de la même période, c'est incontestablement dans la richesse de ses seconds rôles. N'en disons pas plus, des livres ont été écrits pour célébrer ces seconds couteaux dont la seule présence rend parfois nécessaire la vision de tel ou tel film. Se délecte-t-on par exemple de "Dinner at 8" de Cukor pour Jean Harlow ? Oui, mais pas seulement. Et si nous parlions de Marie Dressler, ajoutons Billie Burke.
Née en 1890, Marjorie Main arriva au cinéma en 1932 mais c'est à partir de 1937 qu'elle devint un visage connu, en jouant principalement des mères éplorées d'enfants à problèmes, ce que nous aurions tous été si nous avions enfanté Humphrey Bogart ou Barbara Stanwyck. La gloire vient en 1939 avec "Femmes" de Cukor, qui va poser les bases de sa future carrière : une femme rurale, au franc-parler et au bon sens admirable. Elle a alors 50 ans.
De 1939 à sa retraite en 1958, Marjorie Main va apparaître dans une quarantaine de films pour la MGM, jouant le même rôle avec pratiquement tout le monde et notamment Judy Garland dans "Le chant du Missouri", "Les Harvey Girs" ou "Summerstock". Mais ce à quoi elle ne s'attendait pas en étant "prêtée" à la Universal pour un second rôle dans "The egg and I " avec Claudette Colbert et Fred MacMurray, c'est que sa prestation en fermière autoritaire affublée d'un mari paresseux remporterait un tel succès (et une nomination aux Oscars) que la Universal décida d'en tirer une série.
De 1949 à 1957, Marjorie Main incarna donc Ma Kettle dans 8 films, une rente en quelque sorte, qui lui permit de se retirer sereinement à l'âge de 68 ans et de se consacrer enfin à ses amies, sa passion pour l'art et la botanique. Inutile de dire que Marjorie était dans la vie l'inverse même de ce qu'elle était à l'écran, ayant pour seule ruralité d'être née dans l'Indiana.
La belle histoire du dimanche commence bien avant que Marjorie ne foule les plateaux de cinéma, dans les années 20, alors qu'elle est pourtant déjà actrice et travaille principalement dans le circuit du vaudeville. Issue d'un milieu relativement strict, un père pasteur qui s'oppose fermement à sa carrière et qui l'oblige à changer de nom pour ne pas l'humilier, Marjorie parcourt les théâtres des Etats-Unis et se pose occasionnellement à Broadway où elle fera d'ailleurs la connaissance de celle qui restera l'une de ses meilleures amie, Mae West.
Marjorie a trente ans, elle devine qu'elle ne sera jamais une star étant donné son physique mais ne fait pas ce métier pour cela. Elle parvient à vivre à peu près correctement mais se met à rêver d'une existence plus stable. Elle va alors faire ce qu'elle penser ne pas être pour elle : se marier !
En 1921, Marjorie Main va épouser Stanley Krebs, qui a 26 ans de plus qu'elle et qui occupe l'étrange profession dans les années 20 de psychologue et marchand ambulant. Pour simplifier et même si elle s'en défendra mollement dans ses dernières interviews, Marjorie épouse son père, dans la mesure où l'une des premières choses que va lui demander son époux est d'arrêter sa carrière. Pendant quelques années, les époux Krebs vont sillonner les USA, monsieur Krebs donnant des conférences sur les bienfaits de la psychologie et de la psychanalyse et dénonçant le pseudo pouvoir des médiums qui sont alors très en vogue.
Marjorie, elle, vend les billets, s'occupe de l'intendance, réserve les salles et organise les tournées. Etant donné leur âge, ils ont décidé de ne pas avoir d'enfant que Marjorie trouve par ailleurs fort disgracieux puisqu'ils n'ont pas de profil.
C'est visiblement à partir de la fin des années 20 que Marjorie va se rendre compte que sa première impression était la bonne : le mariage n'est pas pour elle, et que le théâtre lui manque. Contre l'avis de son époux mais dont la fermeté vacille avec les années, elle reprend donc le chemin des planches. Mae West lui propose d'être sa mère dans une pièce, elle accepte même si elle n'ont que deux ans d'écart. Nous sommes en 1928, la suite est expliquée en ouverture de ce billet.
Stanley Krebs va décéder en 1935 à l'âge de 71 ans et Marjorie avouera, alors, avoir eu l'impression de perdre un bon ami. Séparés, le couple n'avait pourtant pas divorcé, Marjorie croyant au sacrement du mariage et au fait d'être la femme d'un seul homme. Elle le prouvera en évoluant désormais dans un univers très féminin et en partageant ses dernières années avec la comédienne Spring Byington.
Ainsi donc le voilà le secret annoncé en titre ? Ou bien est-ce ce mariage qui paraît de convenance ? En fait, pas du tout. Au cours de ses années sur les routes avec son époux, Marjorie ne fit pas que du secrétariat et prit parfois des postes de lectrices dans des universités et donna même parfois des cours d'art dramatique.
Il figura d'ailleurs pendant longtemps dans sa biographie officielle lorsqu'elle entra à la MGM que Marjorie avait enseigné le théâtre à Paris, ce qui est, avouons-le, d'une classe folle. Ce n'était bien sûr qu'un détail dans un curriculum mais suffisamment intrigant pour que, dans les années 70, alors que Marjorie connut un regain de popularité suite à la diffusion télévisée de la série des Kettle, on l'interroge sur ce point. Rouge de honte et sans doute pour la première fois de sa vie, la mère courage préférée des américains (qui n'eut ironiquement jamais d'enfant) dut rétablir la vérité : elle enseigna bien à Paris mais à Paris, Kentucky, 9286 habitants.
De cette petite omission, Marjorie, nous vous pardonnons, et d'autant plus après avoir découvert que vos dernières années se passèrent à Palm Springs. Il suffit parfois de peu de choses pour que plus rien n'ait d'importance. Du moment qu'on reste suave...
S'il est un point commun entre le cinéma français des années 40/50 et son cousin américain de la même période, c'est incontestablement dans la richesse de ses seconds rôles. N'en disons pas plus, des livres ont été écrits pour célébrer ces seconds couteaux dont la seule présence rend parfois nécessaire la vision de tel ou tel film. Se délecte-t-on par exemple de "Dinner at 8" de Cukor pour Jean Harlow ? Oui, mais pas seulement. Et si nous parlions de Marie Dressler, ajoutons Billie Burke.
Née en 1890, Marjorie Main arriva au cinéma en 1932 mais c'est à partir de 1937 qu'elle devint un visage connu, en jouant principalement des mères éplorées d'enfants à problèmes, ce que nous aurions tous été si nous avions enfanté Humphrey Bogart ou Barbara Stanwyck. La gloire vient en 1939 avec "Femmes" de Cukor, qui va poser les bases de sa future carrière : une femme rurale, au franc-parler et au bon sens admirable. Elle a alors 50 ans.
De 1939 à sa retraite en 1958, Marjorie Main va apparaître dans une quarantaine de films pour la MGM, jouant le même rôle avec pratiquement tout le monde et notamment Judy Garland dans "Le chant du Missouri", "Les Harvey Girs" ou "Summerstock". Mais ce à quoi elle ne s'attendait pas en étant "prêtée" à la Universal pour un second rôle dans "The egg and I " avec Claudette Colbert et Fred MacMurray, c'est que sa prestation en fermière autoritaire affublée d'un mari paresseux remporterait un tel succès (et une nomination aux Oscars) que la Universal décida d'en tirer une série.
De 1949 à 1957, Marjorie Main incarna donc Ma Kettle dans 8 films, une rente en quelque sorte, qui lui permit de se retirer sereinement à l'âge de 68 ans et de se consacrer enfin à ses amies, sa passion pour l'art et la botanique. Inutile de dire que Marjorie était dans la vie l'inverse même de ce qu'elle était à l'écran, ayant pour seule ruralité d'être née dans l'Indiana.
La belle histoire du dimanche commence bien avant que Marjorie ne foule les plateaux de cinéma, dans les années 20, alors qu'elle est pourtant déjà actrice et travaille principalement dans le circuit du vaudeville. Issue d'un milieu relativement strict, un père pasteur qui s'oppose fermement à sa carrière et qui l'oblige à changer de nom pour ne pas l'humilier, Marjorie parcourt les théâtres des Etats-Unis et se pose occasionnellement à Broadway où elle fera d'ailleurs la connaissance de celle qui restera l'une de ses meilleures amie, Mae West.
Marjorie a trente ans, elle devine qu'elle ne sera jamais une star étant donné son physique mais ne fait pas ce métier pour cela. Elle parvient à vivre à peu près correctement mais se met à rêver d'une existence plus stable. Elle va alors faire ce qu'elle penser ne pas être pour elle : se marier !
En 1921, Marjorie Main va épouser Stanley Krebs, qui a 26 ans de plus qu'elle et qui occupe l'étrange profession dans les années 20 de psychologue et marchand ambulant. Pour simplifier et même si elle s'en défendra mollement dans ses dernières interviews, Marjorie épouse son père, dans la mesure où l'une des premières choses que va lui demander son époux est d'arrêter sa carrière. Pendant quelques années, les époux Krebs vont sillonner les USA, monsieur Krebs donnant des conférences sur les bienfaits de la psychologie et de la psychanalyse et dénonçant le pseudo pouvoir des médiums qui sont alors très en vogue.
Marjorie, elle, vend les billets, s'occupe de l'intendance, réserve les salles et organise les tournées. Etant donné leur âge, ils ont décidé de ne pas avoir d'enfant que Marjorie trouve par ailleurs fort disgracieux puisqu'ils n'ont pas de profil.
C'est visiblement à partir de la fin des années 20 que Marjorie va se rendre compte que sa première impression était la bonne : le mariage n'est pas pour elle, et que le théâtre lui manque. Contre l'avis de son époux mais dont la fermeté vacille avec les années, elle reprend donc le chemin des planches. Mae West lui propose d'être sa mère dans une pièce, elle accepte même si elle n'ont que deux ans d'écart. Nous sommes en 1928, la suite est expliquée en ouverture de ce billet.
Stanley Krebs va décéder en 1935 à l'âge de 71 ans et Marjorie avouera, alors, avoir eu l'impression de perdre un bon ami. Séparés, le couple n'avait pourtant pas divorcé, Marjorie croyant au sacrement du mariage et au fait d'être la femme d'un seul homme. Elle le prouvera en évoluant désormais dans un univers très féminin et en partageant ses dernières années avec la comédienne Spring Byington.
Ainsi donc le voilà le secret annoncé en titre ? Ou bien est-ce ce mariage qui paraît de convenance ? En fait, pas du tout. Au cours de ses années sur les routes avec son époux, Marjorie ne fit pas que du secrétariat et prit parfois des postes de lectrices dans des universités et donna même parfois des cours d'art dramatique.
Il figura d'ailleurs pendant longtemps dans sa biographie officielle lorsqu'elle entra à la MGM que Marjorie avait enseigné le théâtre à Paris, ce qui est, avouons-le, d'une classe folle. Ce n'était bien sûr qu'un détail dans un curriculum mais suffisamment intrigant pour que, dans les années 70, alors que Marjorie connut un regain de popularité suite à la diffusion télévisée de la série des Kettle, on l'interroge sur ce point. Rouge de honte et sans doute pour la première fois de sa vie, la mère courage préférée des américains (qui n'eut ironiquement jamais d'enfant) dut rétablir la vérité : elle enseigna bien à Paris mais à Paris, Kentucky, 9286 habitants.
De cette petite omission, Marjorie, nous vous pardonnons, et d'autant plus après avoir découvert que vos dernières années se passèrent à Palm Springs. Il suffit parfois de peu de choses pour que plus rien n'ait d'importance. Du moment qu'on reste suave...
C'est suave Palm-Spings?
RépondreSupprimerEt comment ? Mais nous savons que vous jouez au naïf Jérôme :)
RépondreSupprimerMais oui! Les tournois de golf!
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