mercredi 12 juillet 2023

Et maintenant chantons !


L'histoire de la chanson "Spooky" est formidable parce qu'elle incarne à elle toute seule l'esprit des années 60 : nous avons à l'origine un instrumental jazzy louchant vers la musique d'ascenseur, qui devient un tube lorsqu'un groupe pop rock tendance garage lui ajoute des paroles. Et puisque cela fonctionne, le morceau, dans l'année même de sa consécration, va être mis à absolument toutes les sauces, de la plus pure variété à la pop un peu pointue. 

Et personne n'ignore que dans les années 60 justement, lorsqu'un titre atterrit sur un album d'Andy Williams, c'est qu'il en passe d'entrer dans le patrimoine national. Quiconque voudrait d'ailleurs avoir un aperçu de ce qu'on écoutait lors de cette décennie n'a qu'à s'offrir l'intégrale 60's du bel Andy : avec 19 albums enregistrés entre 1961 et 1969 et plus de 250 chansons, on comprend que pas un seul tube n'ait pu lui échapper. Et n'oublions pas que tout est bon dans le Williams, à moins que ce ne soit dans le cochon. Et quand en plus il y a Gladys...



Sans parler de Michele Lee qui est une habituée de nos sagas musicales et estivales, Chris Montez est un autre cas représentatif puisque rockeur dans l'âme, il arrive sous les feux des projecteurs en pleine période twist et mashed potatoes, fait danser les foules avec "Let's dance" en 1962, tremble de n'être que le chanteur d'un seul tube et se réinvente en crooner nouvelle génération sous les conseils de son producteur Herb Alpert. 

"Call me" et "The more I see you" seront des succès énormes, et Chris va devenir une sorte d'Andy Williams plus jeune, plus hispanique et surtout plus aigu. Et non, Chris n'est pas une demoiselle, comme on aura tendance à le penser, comme l'indique sa moustache, même si on nous signale que ce n'est pas forcément une preuve irréfutable. 
























Nous aurions été très tristes si nous avions eu vent de cette nouvelle au moment opportun : le 10 octobre 2022 est décédée à Genève où elle résidait depuis 50 ans Anita Kerr, âgée de 95 ans, bon d'accord, mais quand même. Et pour ceux qui n'auraient jamais croisé son nom sur nos pages, ce qui relève du surnaturel puisqu'elle est partout, Anita fut la femme derrière pratiquement tout ce qui s'enregistra à Memphis dans les années 50 jusqu'au milieu des années 60, réglant les arrangements et les choeurs de titres pour Elvis, Patsy Cline, Willie Nelson, Roy Orbison, Gene Autry ou Brenda Lee. 

Et lorsqu'elle fut lasse de l'ombre, elle déménagea à Los Angeles, avec dans ses valises son groupe de choristes et devint la première dame des harmonies et des contrechants. En compagnie de son quartet ou de son choeur, elle enregistra plus d'une trentaine d'albums entre 1964 et 1977, remporta des Grammys, fut la première femme à composer une musique de film, tourna dans le monde entier et fonda à Montreux un studio d'enregistrement qui deviendra celui du groupe Queen. Et pour tout cela : reconnaissance éternelle.

Pour ajouter à son extrême suavitude, Anita jouait occasionnellement les mentor. En 1969, elle faisait découvrir au monde Teresa Bennett, alias Teresa, 18 ans, guitariste et compositrice dont elle pensait le plus grand bien. L'album qu'elle produisit pour elle n'alla nulle part mais en compensation, Anita l'engagea dans ses choeurs. Ce qui nous permet d'avoir un "Spooky" de plus, ce qui est toujours bien pratique. Et en plus c'est très frais. 

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